Vœu des groupe MECTS (Métropole écologiste et citoyenne pour des territoires solidaires) et AMC (Alternative pour une métropole citoyenne)
En faveur du lancement d’une étude stratégique sur les gisements, l’utilisation et l’implantation de l’hydrogène sur le territoire de la Métropole
L’hydrogène et ses capacités de stockage de l’énergie sont nécessaires à la transition écologique de nos sociétés vers une énergie moins carbonée, en permettant des alternatives aux énergies fossiles dans certains domaines particuliers des transports et de l’industrie. Cette alternative est intéressante dès lors que l’hydrogène est produit de façon peu carbonée, ce qui représente aujourd’hui moins de 1% de la production mondiale d’hydrogène.
À ce titre, la région Occitanie a décidé de lancer un Plan Hydrogène Vert, doté de 150 M€ sur la période 2019-2030, validé conjointement avec l’ADEME. Dans le cadre de ce plan, une station de production et de distribution d’hydrogène «vert» (c’est-à-dire produit par électrolyse avec une électricité d’origine renouvelable) devrait être installée sur le territoire de la Métropole, plus précisément sur la plateforme aéroportuaire de Blagnac, avec une capacité d’environ trois cents kilogrammes par jour, gérée par la société Hyport. Nous avons également sélectionné Hyport lors du dernier conseil métropolitain, toujours dans le cadre de l’appel de la région pour porter un projet de production autour de 330 kg/jour afin d’alimenter 6 bus Tisséo sur le site de l’Oncopole. Et Francazal va accueillir un technocampus de l’hydrogène appliqué à l’aviation, sous l’impulsion de la région Occitanie, avec des capacités de production mises en commun, en étroit lien avec Hyport.
Ces trois projets concernent donc de nouveaux usages de l’hydrogène. Toutefois, l’hydrogène est probablement déjà utilisé sur le territoire de la Métropole (par exemple par Safran Power Units et certains laboratoires de recherche — «Toulouse veut devenir la capitale française de l’hydrogène» dans L’Usine Nouvelle du 26 juin 2019), auquel cas il est peu probable qu’il soit produit de façon peu carbonée.
Afin que le déploiement de la technologie hydrogène permette un effet maximal de décarbonation, il est nécessaire de s’assurer que le déploiement des nouveaux usages de cette technologie ne soit pas plus rapide que le déploiement des capacités de production d’hydrogène peu carboné (hydrogène «vert», «jaune», «bleu» ou «turquoise»), sans quoi, les usagers de cet hydrogène risquent fort de faire appel à une production d’hydrogène plus carbonée pour combler leurs besoins.
De plus, quand on parle d’utilisation d’hydrogène pour l’aéronautique, rappelons que les chercheurs de l’Atécopol et les étudiants de l’ISAE Supaéro ont montré que remplacer le kérosène par de l’hydrogène vert sur uniquement le trafic de Blagnac nécessiterait de créer 200 fois la surface des panneaux solaires de l’Oncopole. Et pour le trafic de Roissy, ce serait construire 16 centrales nucléaires. Ces ordres de grandeur montrent que le passage à un monde moins dépendant du pétrole va demander un plan hydrogène qui prenne en compte les impacts collatéraux et l’acceptation sociale.
Aussi, la transition écologique doit donc commencer par décarboner les usages existants de l’hydrogène, tout en préparant l’apparition de nouveaux usages. Trouver des usages supplémentaires aux projets en cours de production et de distribution d’hydrogène aurait également comme avantage supplémentaire de favoriser la rentabilité de ces projets en permettant d’augmenter leur taille. En effet, selon une analyse de Yélé Consulting, les projets de taille limitée (c’est-à-dire un électrolyseur d’une puissance inférieure à 5 MW) ne seront pas rentables sur 20 ans pour un investissement en 2030, même en considérant une baisse de 30% des coûts d’acquisition de l’électrolyseur et une baisse de 20% du prix de l’électricité par rapport aux niveaux de 2020 (« Hydrogène bas carbone en France : quelles priorités? » in La Tribune du 27 juillet 2020). Nous recommandons donc d’anticiper dès maintenant les possibles utilisations futures de l’hydrogène sur le territoire de la métropole parmi les principaux consommateurs actuels d’énergie fossile.
Une cible pourrait être de remplacer les combustibles fossiles sur les CHU, qui sont de gros consommateurs de gaz et ont des stocks de mazout pour les groupes de secours (600000 m² de bâtiments qui ont consommé 3,2 millions d’euros/an en gaz en 2011). La nécessité d’être autonome en énergie pour les CHU fait de l’hydrogène une piste intéressante de décarbonation.
Une autre serait le parc de véhicules lourds de la Métropole (flotte complète de bus, camions bennes, véhicules ramassage déchets, véhicules utilitaires légers, etc.). Pour permettre la décarbonation de tous ces véhicules, des choix technologiques vont devoir être faits, pour lesquels l’hydrogène est une des options possibles (une étude récente : «Quelle motorisation choisir pour vraiment décarboner le transport routier?» du think tank Carbone 4 de novembre 2020) montre que les trois technologies les plus bas carbone pour ce type de véhicules sont le biogaz, le véhicule électrique sur batterie et l’hydrogène). Même si les investissements associés ont lieu plus tard, il nous semble utile d’étudier dès maintenant les scénarios de consommation d’hydrogène associés à ces choix de technologie de décarbonation.
Le Conseil de Toulouse Métropole, réuni le 17 décembre 2020, propose :
Article 1. Toulouse Métropole lance un audit conduit par la Direction Environnement et Énergie de Toulouse Métropole sur les usages actuels de l’hydrogène sur le territoire de Toulouse Métropole, visant à recenser les volumes annuels utilisés et les moyens actuels de production auxquels il est fait appel.
Article 2. Toulouse Métropole lance un audit conduit par la Direction Environnement et Énergie de Toulouse Métropole sur les usages actuels d’énergie fossile sur le territoire de Toulouse Métropole (industrie, hôpitaux, véhicules lourds…) qui pourraient avantageusement être remplacés par l’hydrogène dans un but de décarbonation sur l’ensemble du cycle de vie et/ou de réduction des pollutions atmosphériques de ces usages.
Article 3. Toulouse Métropole lance une étude prospective conduite par la Direction Environnement et Énergie de Toulouse Métropole visant à aboutir à des préconisations de technologies de décarbonisation pour chacun des usages identifiés par le précédent audit, ainsi qu’à une évaluation des besoins futurs de production d’hydrogène (et donc d’électricité et biomasse à sa source) sur le territoire de la métropole.
Article 4. Le Président de Toulouse Métropole, dans l’optique d’associer les parties prenantes à ce projet, saisit le CODEV pour qu’il étudie le sujet également et qu’il propose, conformément à la nouvelle ambition de celui-ci (DEL-20-1008) et de la Métropole (délibération en préparation en janvier) des dispositifs de participation citoyenne adéquats, financés par la Métropole, afin de travailler sur l’acceptabilité citoyenne du développement d’une telle énergie (risques industriels, artificialisation).