Réforme des critères d’attribution des places en crèche – Conseil Municipal du 1er juillet – Antoine Maurice

Cette délibération est une évolution des critères d’attribution des places d’accueil de la petite enfance, dans un système où vous aviez acté dès 2015 une régression inégalitaire.  

Le système d’attribution des places en crèche par points calculés en présence de la famille, contrôlé par une commission de secteurs pluralistes où siégeaient des acteurs extérieurs, la CAF, la PMI, et dont les travaux étaient publiés mensuellement avait été mis en place par l’ancienne municipalité en 2011 et succédait au néant qui est pour nous l’arbitraire.  

Il était considéré comme un exemple national et a inspiré beaucoup de communes localement comme nationalement.  

La mairie d’alors avait publié à deux reprises les résultats chiffrés avec la sociologie comparée des demandants et des usagers obtenant une place, ce qui était aussi une première en France.  

La mixité sociale était de mise, avec une présence de toutes les catégories en prenant en compte leur réalité numérique dans la société.  

Premier élément, vous n’avez pas ré-introduit les revenus, ce qui en ce moment, est encore plus scandaleux vu les pertes de pouvoir d’achat et l’inflation. 

Pour vous, la situation économique et sociale d’une famille, ça n’existe pas, ça n’existe plus. Le critère revenus était secondaire dans le système mis en place précédemment, il venait nuancer les autres données, notamment le travail et la composition familiale, mais au moins était juste, et ce, pour deux raisons. D’abord, les assistantes maternelles sont chères à Toulouse au regard des rapports entre l’offre et la demande. Et donc, du coup, évidemment, ça ne permet pas à tout le monde d’y accéder. Ne parlons pas de la garde à domicile qui n’est solvabilisée que par des déductions d’impôts, donc pour ceux qui en payent donc. Et le deuxième motif, c’est qu’il y a beaucoup de crèches associatives à Toulouse, et que, compte tenu de la politique productiviste de la caisse nationale des allocations familiales, ces associations, pour se financer, attribuent souvent les places à des cadres qui leur assurent des temps de garde allongés. C’est pourquoi il était nécessaire, même si nous avions réussi à convaincre des associations de rejoindre la commission publique en guichet unique, que le service public puisse assurer une mission d’accueil large sur le plan social (le système associatif ne pouvait se permettre, pour des raisons financières, d’aide sociale au risque de se condamner économiquement) 

Un critère absurde que vous maintenez, l’antériorité de la demande, qui rapporterait 1 point. D’abord, l’antériorité, c’est le hasard, et donc, le hasard, ce n’est pas forcément juste, ça veut dire que ça facilite la course absurde à l’inscription et au « premier arrivé, premier servi », qui va conduire les parents à chercher des places le plus tôt possible, comme ça pouvait se faire auparavant. C’est pourquoi le système que nous avions créé se servait uniquement de la date pour départager deux personnes à égalité.  

Ensuite, on s’interroge surtout sur le maintien du critère de reprise d’activités avec justificatifs. Le fait de reprendre une activité donne une bonification. On se demande pourquoi, puisque dans le système antérieur, on comptait déjà comme travailleur celui qui prouvait qu’il allait accéder à un emploi. De plus, lorsque les personnes accueillies à temps partiel obtenaient un emploi, elles avaient une bonification de points pour obtenir un temps plein. Donc cela favorisait l’insertion, le mode de garde pouvant constituer un obstacle. Ensuite, surtout, on ne sait pas à qui va s’appliquer cette bonification « reprise d’activité », car reprendre un emploi ne veut rien dire en soi. Est-ce que c’est sortir du chômage ? Si c’est le cas, pourquoi le compter deux fois ? Puisque sont comptés déjà comme travailleurs… Si c’est un retour de congé de maternité, tout le monde aura le point et ça ne sert à rien. Et si c’est des retours de congés parentaux, ce serait injuste, puisque la famille serait aidée deux fois : une fois par l’allocation au congé parental, l’autre fois par une priorité crèche que n’ont pas les autres familles. Mais on dit que cette justification floue sera accordée sur justificatifs, sauf qu’on ne sait pas lesquels.  

Vous maintenez donc le flou généralisé, et nous le craignons, je le dis clairement, que c’est une manière pour vous de reprendre la main et de l’accorder à qui bon vous semble. Lorsque l’interprétation n’est pas donnée d’avance objectivement, la politique peut se masquer derrière des critères pour établir son pouvoir sur la distribution individuelle des ressources rares. Puisqu’on sait que les places en crèche sont rares, et c’est cela qui doit nous obliger à d’autant plus de transparence et d’objectivité dans l’attribution de celles-ci. 

L’autre élément qui nous inquiète, c’est la composition de la nouvelle commission d’admission. 

Vous introduisez des agents en plus, qui ne sont pas du secteur petite enfance, 

comme « les responsables de secteur »…. C’est-à-dire celles et ceux qui sont le plus en lien direct avec les habitantEs et donc sous pression des demandes… Qu’est-ce que cela signifie ? Que des aspects qui n’ont rien à voir avec la petite enfance, comme des considérations personnelles ou politiques, peuvent être introduites en réunion. Aussi cet élargissement pose la question d’une reprise en main de la commission par le politico administratif par rapport aux professionnels de la petite enfance, et évidemment le risque de clientélisme. 

Par ailleurs, on peut certes trouver que l’élargissement des critères aux haltes garderies et accueils d’urgence est une bonne mesure du point de vue de l’équité (comme quoi Mme l’adjointe vous vous y êtes finalement ralliée) mais par contre cela va entrainer une bureaucratisation du système : pour avoir une halte-garderie ça allait vite et là il faudra en passer par tout un processus, ce qui va mettre les familles en difficulté et les pousser vers…. Le libéral !  

Ce que vous souhaitez en réalité. 

En fait comme vous avez des postes vacants partout, vous réduisez l’offre. 

Vous avez des postes vacants parce qu’il n’y a plus de projet attractif,  

Toulouse est devenue un repoussoir et vous dissuadez les gens de candidater pour pouvoir continuer avec des effectifs et des horaires réduits. 

Pourquoi plus de projet attractif ? 

  • vous avez abandonné les conseils de crèche par secteur qui associaient les parents aux projets. Ex : ils avaient eu l’idée de travailler sur la culture et un festival artistique parents enfants professionnels avait été organisé aux Abattoirs avec 3000 participants 
  • vous avez abandonné les emplois d’avenir en appui pour aider les crèches à travailler sur la culture 
  • vous avez abandonné le travail d’action recherche avec la faculté Jean Jaurès du Mirail sur l’égalité filles garçons, qui avait bien mobilisé les équipes 
  • vous avez arrêté d’associer les assistantes maternelles au contrôle public pour préférer les livrer au libéral sans projet pédagogique et beaucoup plus cher, sans critère d’admission 
  • l’arrêt des taux d’encadrement au-dessus du minimum requis 
  • les horaires plus longs que vous avez réduit etc 

L’attractivité à laquelle vous êtes si attachés, elle existait avant votre arrivée, et les recrutements n’étaient pas aussi compliqués ; maintenant, la Mairie ne parvient plus à recruter parce que Toulouse en petite enfance a désormais une mauvaise réputation, avec des conditions de travail qui ont été démolies. 

Et le dernier point, c’est que, vous vous étiez engagée à un précédent conseil municipal, Madame Katzenmayer, à présenter ici le rapport de la commission d’admission des places d’accueil petite enfance. Vous ne l’avez pas voulu et souhaitez le faire seulement en commission, donc de manière non publique, pour ne pas permettre le débat contradictoire et la compréhension par tous les habitantEs de ce que ne dit pas clairement ce bilan. 

Quelle est la réalité ? 

Ce rapport nous rappelle que depuis 8 ans, vous n’avez créé aucune crèche publique, et pire, fermé les crèches familiales. 

Il nous indique qu’UN TIERS des demandeurs sont découragés et poussés vers le libéral, dans le rapport 2021.  

Plus de 2500 familles n’ont pas obtenu de places en accueil collectif comme elles le souhaitaient initialement. Et peu parmi celles-là ont abandonné réellement cet objectif. 

Vous expliquez qu’il n’y a pas de problème à ces refus, car il y aurait des places en crèches privées en dehors de la commission (pour ceux qui peuvent payer) et beaucoup de places d’assistantes maternelles et confirment donc votre intention de pousser nos habitantEs vers le libéral, sans se soucier de celles et ceux qui survivent avec ou sans travail, car M. Briand, les plus modestes d’entre nous sont aussi et beaucoup des travailleurs pauvres. 

Conclusion : 

La vraie évolution dont vous ne parlez pas ni dans le règlement d’attribution ni dans le rapport annuel de la commission d’admission, c’est que vous coupez les horaires et dégradez la qualité de couverture du service public, en poussant vers le libéral. 

Sous votre mandature, le système aura non pas stagné mais régressé, c’est sans doute ça « Toulouse plus facile », ne plus se préoccuper de l’épanouissement de nos plus jeunes enfants. Nous ne vous suivrons pas sur cette voie.