PADD : l’heure n’est plus au « en même temps » – Conseil de Métropole du 6 avril 2023 – Isabelle Hardy

Monsieur le Président, chers collègues,


Après les échanges dans nos Conseils Municipaux respectifs, nous sommes amenés à débattre aujourd’hui sur le Projet d’Aménagement et de Développement Durable (PADD), dont les orientations sont d’une importance capitale sur la réalisation du PLUIH, et donc sur l’aménagement du territoire qui sera conduit dans les années qui viennent.
Rappelons que notre collectivité vit une situation sans précédent. Tout un mandat de 2014 à 2020 pour élaborer un PLUIH et un PDU qui correspondaient à vos politiques d’urbanisme et de mobilité, essentielles pour donner le cap et le cadre aux acteurs qui coopèrent à l’avenir de notre collectivité. Et dans ce deuxième mandat on recommence à faire de même. Et tout ça comme si rien ne s’était passé, comme si tout allait bien.


Or, nous sommes dans un contexte de crise climatique d’une gravité sans précédent, qui n’est d’ailleurs plus une crise car elle ne s’arrêtera pas et nous devons donc changer de paradigme. Le 6ème rapport du GIEC est toujours alarmiste : il rappelle que les émissions de gaz à effet de serre dues aux activités humaines ont réchauffé le climat à un rythme sans précédent, et quels que soient les scénarios d’émission, le GIEC estime que le réchauffement de la planète atteindra 1,5°C dès le début des années 2030.
Il est de notre responsabilité de ne plus regarder ailleurs. Nous sommes dans un moment historique car toutes les politiques publiques et particulièrement celles des métropoles seront redevables devant les générations futures.
Le PADD doit donc s’inscrire pleinement et impérativement dans le tryptique que nous connaissons bien – Baisse des gaz à effet de serre, Adaptation du territoire et accompagnement – et répondre concrètement au défi de transition écologique et aux urgences qui en découlent. Ce PADD n’est pas un PADD comme les autres…
Et si vous partagez la nécessité de mettre ces enjeux au cœur de la stratégie et du cap fixé par le PLUIH, alors nous devons révolutionner notre approche en matière d’urbanisme et changer de paradigme.
Nous ne pouvons plus produire un PADD qui se limite à de bonnes intentions, ou dans lequel on retrouve des actions contradictoires. On se veut vertueux sur certaines orientations tout en conservant des mesures et des projets écocides…


Le PADD ne doit pas être la méthodologie du « en même temps ».
La gravité de la situation nous oblige. Ce PADD doit aller plus loin que les précédents et définir plus précisément les axes prioritaires qui devront figurer dans le PLUIH et son règlement. Car d’expérience nous savons maintenant que la formulation est importante et ne doit pas laisser la possibilité de l’interprétation du contraire.


C’est dans ce sens et dans une démarche constructive que nous avons émis un certain nombre de propositions, que nous avons adressées à l’ensemble des conseillers métropolitains. Et ces propositions rejoignent d’ailleurs pour beaucoup celles émanant de communes et ou des personnes publiques associées. Nous ne les aborderons pas toutes mais vous nous permettrez de faire quelques focus.
Je souhaite aborder la mobilité qui est une composante majeure de la transition écologique, élément essentiel des émissions de Gaz à effet de serre, qui représente une part importante de la pollution de l’air de notre agglomération et qui est aussi déterminante dans le nouveau modèle de société nécessaire à une meilleure qualité de vie de nos concitoyens.
Or, au regard des enjeux, si dans les 10 ans qui viennent, nous ne nous attaquons pas à réduire la place de la voiture, nous ne serons pas au rendez-vous. Et aujourd’hui dans le projet de PADD tel qu’il est rédigé, la réponse est incomplète. Nous ne pouvons pas, en responsabilité, repousser à 2040 ou 2045 (comme nous l’a écrit Mme Laigneau), la mise en œuvre de solutions de mobilité qui réponde à l’urgence. Vous nous dites qu’il est prématuré d’évoquer le RER dans la temporalité du PLUIH.
Or, Il est capital d’y intégrer l’ambition du projet de Service Express Métropolitain (ou RER Metropolitain) qui n’est pas, je le précise, uniquement l’amélioration de l’offre de train.
Il ne s’agit pas d’opposer les solutions, le tram contre le métro ou le métro contre le train, mais aujourd’hui comment nier que les voitures qui s’agglutinent sur les rocades et dans Toulouse ne viennent pas des deuxièmes ou troisièmes couronnes voire au-delà… réduire la place de la voiture dans notre agglomération passe par la nécessité d’inscrire tous les modes de mobilité alternatifs à la voiture en priorité dans ce PADD.

Ce projet de SEM, sur l’étoile ferroviaire toulousaine est le chainon manquant pour optimiser le réseau structurant sur l’ensemble de l’aire périurbaine et offrir à la population l’offre performante dont elle a besoin d’autant plus dans le contexte de hausse de coût de l’énergie, de mise en place de la ZFE et de crise écologique. Cela doit être un réseau structurant démultiplié qui permet une gare d’échange ou un point de rabattement à proximité des habitants de la métropole, et spécifiquement à Toulouse où l’on pourra aller d’un point à un autre sans que le terminus ne soit Matabiau. Et c’est un projet qu’il faut intégrer dans le PADD car il a l’avantage de pouvoir se développer par étape, ce qui n’est pas le cas du métro.
Car dois-je vous rappeler l’ambition partagée (dont je ne veux pas douter de la sincérité) affichée par la Métropole à travers son vœu pour un accord sur des avancées concrètes du RER toulousain voté à l’unanimité lors du Conseil du 20 octobre 2022, mais aussi la volonté de l’Etat à travers la note d’enjeux et portée à connaissance relative à l’élaboration du futur PLUi-H adressée par le Préfet le 24 mai 2022 ?


Et enfin, bien sûr rappelons que le Président de la République a annoncé la volonté de financer le développement des services express métropolitains dans les dix principales métropoles françaises, sous réserve qu’il y ait un projet. Alors bien sûr il faut des études complémentaires mais aujourd’hui vous bloquez l’ambition d’un projet. Tout le monde sait que ce projet dépend de la volonté de tous les acteurs institutionnels mais en priorité de celui qui a la compétence de la mobilité urbaine de notre territoire Tisséo et donc surtout de vous Monsieur le président comme l’écrit d’ailleurs Mme Laigneau dans son courrier en réponse à nos d’amendements.
Par ailleurs, la note d’enjeu recommande que « l’intégration des projets d’amélioration du niveau d’offre en mobilités dans le PLUi-H conduise à renforcer la production de logements en intensification sur la ville centre et les communes pôles bien desservies et limiter de fait les besoins d’extension de l’urbanisation.
Le SEM permettra en effet l’adéquation du développement urbain et la desserte en transports en commun en élargissant les capacités de densifier sur l’ensemble de la ville centre, mais plus largement sur l’ensemble de l’agglomération, en favorisant les pôles d’échanges et la création de lieux de vie. Ce qui ne sera pas le cas avec le corridor de la 3ème ligne de métro qui ne connaîtra pas une densification à la hauteur des besoins.
Nous vous proposons donc d’inscrire ces éléments dans le PADD et d’y apporter aussi les contributions de Rallumons l’Etoile.


Mais la mobilité c’est aussi l’ambition cyclable… qui n’apparait pas dans la 1ère version mais qui devrait selon Mme Laigneau apparaître dans la prochaine. N’ayant pas eu accès à cette version je souhaite juste apporter quelques précisions : le « réseau express vélo » (REV) est un élément essentiel pour orchestrer les déplacements cyclables à l’échelle du territoire métropolitain et au-delà. La Métropole doit s’engager à réaliser l’ensemble des aménagements nécessaires à la structuration des douze lignes du REV d’ici 2026. Mais il faut aller plus loin que le REV dans tous les projets urbains de proximité.


Chaque faubourg ou quartier périphérique devrait avoir la même attention et la même qualité urbaine que le centre-ville de Toulouse depuis quinze ans. Particulièrement dans la conception des mobilités douces de proximité. Vélos et piétons retrouveraient toute la place en cohérence avec les transports en commun dans la vie de proximité et des quartiers.


Enfin la mobilité c’est aussi une vraie politique en termes de réduction de la place de la voiture, donc de piétonnisation et une cohérence avec le développement de transports en commun et modes doux performants. En ce sens l’ambition doit être précisée dans le PADD, avec une vision globale et des articulations cohérentes avec l’ensemble de l’offre de transports en commun.