Métropolisation et coopération entre les territoires – Isabelle Hardy – Conseil du 17 décembre 2020

Je n’ai pas lu le rapport national, mais l’article, non pas de « La Dépêche », mais du journal « Le Monde » qui donne le ton de ce rapport sur le chapitre des métropoles, en qualifiant le bilan à ce jour de « peu convaincant ». Il est d’abord rappelé ce que certains avaient dénoncé dans cette période, à savoir le statut de métropole qui, au départ, n’était réservé qu’aux territoires ayant des critères objectifs, comme le niveau universitaire de la recherche, le rayonnement industriel et économique, l’importance des infrastructures de mobilité, les équipements et la qualité du dispositif de santé, ou le nombre d’habitants. Malheureusement, ce statut a parfois été attribué au gré de baronnies locales. Et donc, au lieu d’avoir 5 à 8 métropoles, il y en a eu 19, très disparates, de 21 500 habitants à Brest jusqu’à 1,8 million d’habitants à Marseille.

En fait, pour nous, c’est une conception des métropoles qui s’est mise en place avec des politiques libérales qui, dans le concert mondialisé, voit essentiellement ces territoires, comme une puissance et un rayonnement européen, voire mondial, avec une logique de concurrence et d’attractivité. Et avec une stratégie du ruissellement qui serait induite par la redistribution des métropoles vers les territoires autour d’elles. Or, le bilan est décevant et la Chambre l’exprime. Je la cite : « Les métropoles n’entraînent pas systématiquement dans leur sillage le reste de la région, certaines se développant de manière isolée, comme Bordeaux, Lille, Montpellier et Toulouse ». C’est un débat que nous avons porté, dans le précédent mandat, comme pendant la campagne électorale. Mais votre choix, Monsieur le président, n’est pas suffisamment celui de la coopération. Non seulement les ressources ne sont pas suffisamment partagées au-delà de la métropole, mais au contraire, la concentration des projets se fait trop sur Toulouse et quelques territoires de notre agglomération. Je ne reprendrai pas la mobilité, qui est l’exemple que nous citons de concentration des moyens sur un territoire central, mais on peut parler de recherche et d’enseignement supérieur, d’économie, d’équipements culturels, de santé, d’infrastructures de transport. Alors, vous me répondrez : « C’est notre histoire et des décisions issues depuis plusieurs décennies ». C’est vrai et c’est aussi cette histoire qui a eu le mérite de mettre nos quartiers dits prioritaires dans cette centralité. Mais ce n’est pas une fatalité et nous pensons depuis longtemps que les contractualisations peuvent infléchir cette concurrence vers plus de coopération. Prenons celles avec la Région et le Département, la Métropole fait bien souvent son marché, finalement, pour financer ses projets en intra et ainsi soulager ses finances. Et ce levier ne peut que créer encore plus d’inégalités, car la Région et le Département venant au cofinancement des projets pilotés par la Métropole, on a la démonstration que sa puissance financière draine une grosse partie des ressources. Nous sommes convaincus qu’une bonne partie des ressources de la Métropole, avec des financements de la Région en particulier, peuvent construire du développement partagé pour d’autres territoires, sur des filières économiques, agricoles, mais aussi culturelles, touristiques et sportives

Cela nécessite une nouvelle vision que celle que vous avez mise en place. Par exemple, citons le dialogue métropolitain des villes moyennes de l’ancienne Région Midi-Pyrénées, que vous n’avez pas abandonné comme vous me l’avez fait remarquer, mais qui mérite, selon les termes précis du Codev, non pas d’être relancé, mais d’être « revigoré ». Vous avez décidé de transformer l’association qui, certes, existe toujours mais qui, aujourd’hui, collecte les cotisations des collectivités membres pour les reverser entièrement à l’AUAT. Je suis d’ailleurs surprise de cette décision qui n’a jamais fait l’objet d’un débat métropolitain. Et vous pourrez aussi nous indiquer quelle place vous souhaitez faire à la Région ? Pouvons-nous également faire un bilan de nos partenariats en cours, avec Montpellier, avec le Cœur de Comminges et le Pays des Portes de Gascogne ? Au-delà du coût médiatique, politique, quelles sont les retombées en matière de redistribution ? La coopération peut aussi se faire par un meilleur partage des outils et des dispositifs, à condition que les gouvernances soient réellement partagées sans hégémonie de la Ville de Toulouse. Citons par exemple Tisséo qui pourrait initier de réels projets, sur un territoire plus grand, comme le RER toulousain, en réel partenariat avec la Région. On peut aussi envisager une corrélation plus forte entre le SCoT et même l’inter SCoT, le PLUi-H et surtout le PDU ou un contrat de plan Région-Métropole. On peut l’entendre comme une démarche de développement où les retombées seraient définies par des critères de lutte contre les inégalités territoriales, des besoins d’équipements, de complémentarité, de compétence économique et sociale, au travers, par exemple, de l’énergie, de l’économie sociale et solidaire ou de l’alimentation.

Un autre point que je souhaiterais aborder est celui de l’attractivité. Sans être longue, la fusion de l’office de tourisme, de la SEM convention bureau So Toulouse, de l’agence de développement économique Invest appelle beaucoup d’interrogations. Dans ce rapport, il est notamment noté une absence de lisibilité de l’affectation des produits de la taxe de séjour au financement de la promotion touristique du territoire qui s’avère, je cite, « problématique », alors même que les coûts de fonctionnement de la SEM ont augmenté de 60 % entre 2015 et 2018. C’est cette opacité que nous regrettons et nous le redirons au cours de ce Conseil, notamment sur la création du fonds Congrès dont on ne sait quels seront les critères d’attribution et s’il sera réellement mis au service de l’ensemble des acteurs du territoire.

Enfin, comme mes collègues avant moi et j’en terminerai par là, nous ne pouvons passer sous silence les remarques de la chambre régionale des comptes sur la gestion de l’eau qui souligne, comme nous l’avions toujours dit, que la comparaison des offres a été faussée au profit de la délégation de service public. L’analyse a été biaisée et nous restons persuadés que la régie n’aurait pas induit une hausse des prix comme vous le pressentiez. C’est aussi la raison pour laquelle nous avions décidé de porter un recours contre ce contrat.