Démocratie et urbanisme – Romain Cujives – Conseil du 4 février 2021

Les objectifs, cela a été dit, de la première modification du PLUi-H tels qu’ils nous sont aujourd’hui présentés, et c’est naturel, constituent de grandes orientations. Nous tenons à le dire, nous serons vigilants quant à leur traduction réglementaire concrète. Vous nous proposez, par exemple, d’améliorer l’insertion urbaine des projets ainsi que la prise en compte du contexte. Je ne peux que vous encourager dans ce sens afin que l’urbanisation et la densification de nos territoires cessent enfin de produire ce qu’il convient aujourd’hui de nommer « la ville moche » comme c’est aujourd’hui encore trop souvent le cas. Des matériaux, des formes urbaines, la valorisation d’éléments patrimoniaux ou végétaux remarquables, nous avons encore bien des progrès à faire pour garantir davantage de qualité dans la construction de la ville.

Vous souhaitez, par ailleurs, Madame la Vice-Présidente, je vous cite dans la délibération, « tenir compte de l’avancement des réflexions et des études menées ». Je me réjouis de cette perspective et je formule ici le vœu que cette modification du PLUi-H puisse véritablement accélérer la nécessaire mise en cohérence entre, par exemple, les projets de transports d’une part et les secteurs ouverts à l’urbanisation d’autre part. Ainsi, je souhaite qu’au travers de cette modification du PLUi-H, notre collectivité puisse présenter sa stratégie d’urbanisation, nous l’avons souvent demandé, ou plutôt de densification, autour des axes de transport, et singulièrement, Monsieur le président, autour de la troisième ligne. Quels secteurs sont concernés ? Dans quelle temporalité ? Sous quelles modalités opérationnelles ces mutations doivent-elles et vont-elles s’opérer ?

J’en profite ici pour rappeler la nécessité de mobiliser chaque fois les bons outils permettant à notre Métropole de capter une partie de la rente foncière, afin de prendre en charge une partie des coûts inhérents à la densification de nos quartiers. Ces outils existent, j’en parlais lors du dernier ou l’avant-dernier Conseil métropolitain. ZAC, concessions d’aménagement aussi, y compris sans que la collectivité ne se porte demain acquéreur de l’intégralité du foncier à urbaniser ou à renouveler. Engageons ce travail sans délai. Chers collègues, nous avions évoqué la création d’un groupe de travail, qui n’a pas encore eu lieu. Les prises de position des promoteurs immobiliers auront rendu caduques ces stratégies si nous n’allons pas plus vite qu’eux.

Vous nous indiquez, par ailleurs, que la première modification du PLUi-H pourrait être l’occasion d’ouvrir de nouveaux territoires à l’urbanisation. Je vous le dis clairement, cette perspective aujourd’hui m’inquiète. Ouvrir de nouveaux territoires à l’urbanisation, c’est grignoter des terres non artificialisées aujourd’hui, souvent des terres cultivées. C’est poursuivre encore l’extension urbaine sans retenir aucune leçon de l’étalement déjà considérable de l’aire urbaine toulousaine. C’est multiplier à nouveau les kilomètres de voirie, de réseaux, c’est diluer notre effort de desserte en transports en commun, c’est aussi priver finalement notre territoire de capacités de production maraîchère au plus près des consommateurs. Alors, bien sûr, il peut y avoir des exceptions, il peut y avoir des opportunités, il faudra les étudier. Mais nous devons être extrêmement vigilants sur cette question et systématiquement se poser la question : « N’est-il pas possible de privilégier finalement le renouvellement urbain, la reconstruction de la ville sur la ville elle-même ? »

Enfin, et je vais conclure, vous annoncez votre intention de renforcer la préservation de l’environnement dans le cadre de cette modification du PLUi-H, Madame la Vice-Présidente, que vous nous avez brièvement présentée. Permettez-moi d’être très soucieux à ce sujet. Nous avions collectivement pris l’initiative de premières mesures volontaristes lors de l’élaboration du PLUi-H et ces mesures me semblent aujourd’hui clairement en danger. Je pense, par exemple, au coefficient de surfaces éco-aménageables qui constitue l’outil de mesure de l’ambition de végétalisation des projets immobiliers, on en a parlé régulièrement, et de préservation des terres perméables. Or, aujourd’hui, ce coefficient est utilisé dans la mise au point et dans l’instruction des permis de construire pour autoriser ou refuser les projets selon leur niveau de qualité du point de vue de la préservation de la nature en ville. Il semblerait que les forces conservatrices opposantes à cet outil aient décidé de s’attaquer à la modification du PLUi-H et que cette modification soit finalement une opportunité pour qu’ils parviennent à leurs fins. Chers collègues, nous devons nous préparer collectivement à lutter contre ce lobbying qui viendrait grever de façon très importante les objectifs qui sont les nôtres en matière de biodiversité et de végétalisation de la ville. Parce que je ne peux pas être trop long, je veux saluer et dresser quelques pistes concernant le partage finalement de cette information autour de la modification du PLUi-H. Nous devrons demain aller davantage au-devant des habitants. Nous ne devrons pas attendre qu’ils viennent assister à des réunions publiques, on en parlait à l’instant, malheureusement essentiellement fréquentées par celles et ceux qui sont d’ores et déjà très investis dans la vie locale. Nous devons élargir le champ de cette concertation. Nous devons organiser des tournées dans les quartiers, dans chacune des communes, avec des stands mobiles d’information par exemple. Nous devons générer du débat et ne pas seulement recueillir les contributions des spécialistes les plus affûtés. Nous devons enfin au contraire susciter ces contributions en aidant les habitants des secteurs concernés à exprimer leurs attentes, leurs espoirs et leurs craintes. N’ayons pas peur d’innover, organisons des séances de formation, des ateliers contributifs. J’ai l’intime conviction que nous saurons ainsi créer des outils adaptés, y compris si demain la crise sanitaire devait se poursuivre.