Débat d’orientation budgétaire – Michèle Bleuse – Conseil du 4 février 2021

Monsieur le président, chers collègues. Quelques focus également pour notre groupe Métropole Écologiste et Citoyenne. Tout d’abord, le contexte économique puisque c’est une partie importante, Madame TRAVAL-MICHELET l’a noté, des éléments qui nous ont été communiqués. Alors que la pandémie de Covid est à l’origine d’un choc social, économique et financier totalement inédit, c’est le terme qui convient, un seul qualificatif peut caractériser la succession des lois de finances rectificatives tout au long de l’année 2020 ainsi que les hypothèses de la loi de finances 2021, c’est le déni de réalité. Il est fait mention et vous les reprenez dans la présentation de ce rapport, d’hypothèses de retour rapide ou progressif à la normale, de budget de fin de gestion de crise. De fait, à l’identique des responsables nationaux, l’équipe de l’exécutif métropolitain s’inscrit dans ce déni de la réalité, de la réalité sociale, économique et financière, semblant faire siennes ces hypothèses sans aucun commentaire dans le document. Dans le cadre de la loi de finances pour 2021, l’État annonce le maintien des dotations aux collectivités et annonce la compensation de certaines pertes de ressources via une nouvelle dotation de compensation. Cet engagement est ou serait quasiment le seul point de stabilité que nous pouvons acter. Nous avons ensuite accès à l’atterrissage 2020 du compte administratif, qui nous permet d’avoir des éléments d’appréciation pour les projections 2021. Une seule certitude, l’année 2020 est marquée par une récession sociale et économique d’une ampleur, je le redis, inédite, mais qui semble avoir faiblement impacté les comptes 2020 de la Métropole. En effet, quand on compare les chiffres du document à la trajectoire 2020, qu’on a retrouvés d’ailleurs dans les documents du compte administratif 2019, l’épargne nette ne serait, j’utilise par précaution le conditionnel bien évidemment, inférieure que de 4 millions d’euros à la trajectoire du budget voté, du budget primitif. En effet, c’était programmé à 31 millions d’euros d’épargne nette, il semblerait que l’on se positionne aux environs de 27. Par contre, et ce n’est qu’une ligne, il est acté que les impacts majeurs toucheront les prochains exercices 2021 et 2022, a minima en effet, il n’est pas possible de se projeter beaucoup plus loin. En ce qui concerne la déclinaison des orientations budgétaires 2021 à proprement parler, l’objet de nos échanges de ce jour, le degré d’incertitude, nous le disons également, qui entoure les projections sociales, économiques et financières sur notre territoire, ce degré d’incertitude est inhabituellement élevé, je rejoins Madame TRAVAL-MICHELET sur son analyse. Et pourtant, le montant de la programmation pluriannuelle des investissements est annoncé dans ce document, programmé, vous l’avez dit Monsieur BRIAND, à 1,5 milliard d’euros, pouvant être porté à 1,8 milliard d’euros, soit quasiment une reconduction du montant exécuté du précédent mandat.

Sur le plan qualitatif de cette programmation des investissements, nous n’avons pas d’éléments sur les critères d’arbitrage et pourtant, en phase avec l’impératif d’agir sur les urgences sociales et environnementales, nous avons régulièrement proposé que les actions et les budgets de la Métropole se concentrent sur la transformation et l’adaptation, ça a été redit pour d’autres points ce matin, et notamment les circuits courts, l’autonomie, la relocalisation. Nous avons proposé que toutes les décisions de la collectivité et donc les décisions budgétaires passent par le filtre d’un impact positif ou neutre pour le climat et la biodiversité, passent par le filtre de tous les enjeux du développement durable. Nous vous posons la question, est-ce bien ainsi que les arbitrages de la programmation pluriannuelle des investissements métropolitains seront rendus ? Peut-on débattre des modalités d’arbitrage ? Sur le plan quantitatif de la programmation des investissements, quelles ont été les modalités de détermination de ce montant ?

Car a priori, ce montant d’investissement devra être financé de manière significative par un recours supplémentaire à la dette, compte tenu de la baisse de l’épargne annoncée. Il est impossible de se projeter autrement et de l’engagement acté dans le document de stabilité fiscale, sauf à changer de position en cours de mandat, comme cela avait été le cas lors du mandat précédent. Donc, nous, on vous demande comment effectivement ce montant va être financé, alors même que la précédente programmation pluriannuelle a déjà dégradé fortement la situation financière de la Métropole. Il y a, certes, la qualité de la dette, mais il y a aussi son montant. En effet, sur le mandat précédent, la dette de la Métropole a été multipliée par deux. Sur le mandat précédent, la capacité de désendettement s’est fortement dégradée et nous savons bien, Monsieur BRIAND, que ce n’est pas uniquement lié aux montants mais également à l’épargne dégagée, et justement l’épargne s’annonce faible.

Troisième point, concernant la programmation des investissements, nous, nous pensons qu’il est également nécessaire que les investissements métropolitains soient harmonieusement répartis sur le territoire et nous pensons que cette orientation mérite d’être portée au débat. Autre élément important, les dépenses de fonctionnement, avec un focus particulier, l’exécutif métropolitain annonce dans les éléments communiqués la maîtrise de la masse salariale comme un levier de la maîtrise des dépenses de fonctionnement. Nous avons des questions à vous poser pour pouvoir débattre de manière éclairée, et nous considérons notamment nécessaire de préciser les impacts de la mutualisation des agents de la Métropole. Elle porte, pour ce que nous en connaissons, uniquement sur les tâches toulousaines, parce qu’aujourd’hui, sur budget principal qui prévoit une masse salariale à 188 millions d’euros environ, 40 millions d’euros sont mutualisés sur la Ville de Toulouse. Donc nous voudrions savoir effectivement comment cette importante mutualisation de masse salariale peut être un levier, effectivement, dans ce que vous appelez la maîtrise de la masse salariale. D’après nos appréciations, cela pourrait représenter 1 000 équivalents temps plein, vous nous direz si vous confirmez cet impact. Autre point important concernant la maîtrise de la masse salariale, nous voudrions que vous nous donniez l’estimation de l’impact financier de ce que vous appelez « le projet vers les 1 607 heures », parce qu’effectivement, une simple règle de trois permet de montrer qu’il sera peut-être, mais tout dépend de la façon dont ce sera décliné pour les fonctionnaires de notre collectivité, d’augmenter le temps horaire annuel de 4,8 %. Ce n’est pas neutre quand on pilote effectivement la masse salariale. Nous voudrions nous assurer que ce n’est pas une opportunité de maîtrise de masse salariale.

En synthèse, qu’il s’agisse des recettes sur les éléments qui sont à la main de la Métropole, à savoir la fiscalité locale, qu’il s’agisse du fonctionnement ou des investissements, nous avons besoin de savoir quelles sont les modalités de mutualisation, quelles sont les modalités de répartition territoriale, quelles sont les modalités d’arbitrage quantitatif et qualitatif. Tous ces éléments, modalités de mutualisation, de répartition territoriale, d’arbitrage, ont, de notre point de vue, vocation à être intégrés dans le fameux pacte de gouvernance que certains appellent « d’allégeance », mais je n’irai pas jusque-là, ce pacte qui pourrait être, qui devrait ainsi être utilement et dans la transparence, complété par ces volets financiers et fiscaux. C’est pourquoi nous vous demandons de les intégrer dans ce pacte et nous vous demandons de le porter à la connaissance de tous les élus de la Métropole. C’est justifié et nous voulons pouvoir débattre d’orientations budgétaires et donc politiques, qui transforment nos communes et la métropole, et s’inscrivent réellement dans la prise en compte des enjeux de développement durable et des enjeux de transformation sociale et économique structurelle. Parce que, non, nous ne reviendrons jamais à une normale d’hier ou d’avant-hier. Et ces éléments, ces enjeux, s’imposent aujourd’hui à notre collectivité comme jamais, d’autres l’ont dit avant moi.

En conclusion, pour anticiper sur l’ironie, la posture de juge, de supposée contradiction de notre vice-président aux finances, et surtout, surtout, pour rester dans un cadre de débat, et je le redis sans ironie et sans jugement, nous prendrons acte, si c’est le cas, que vous n’êtes pas d’accord avec nos analyses ou que vous refusez nos propositions, en particulier sur l’intégration et la transparence concernant un grand nombre d’éléments d’arbitrage qui devraient faire l’objet de débats politiques, parce que c’est bien là qu’est le débat politique donc le débat de ce jour sur les orientations budgétaires.

Quelques éléments de débat, là, fondamentalement, Monsieur MOUDENC. J’ai écouté ce que vous avez dit, j’ai écouté pour le compte de notre groupe ce qu’a dit Monsieur BRIAND. Vous avez parlé l’un ou l’autre de procédure d’arbitrage, d’arbitrer collectivement : « Ces procédures sont en cours », « il y a des méthodes ». Mais c’est ce que nous vous demandons. Nous comprenons, que ce soit pour les investissements ou pour des éléments fiscaux, que le débat et les arbitrages sont délocalisés ailleurs. C’est ce que vous venez de nous dire et c’est ce que nous actons aujourd’hui. C’est pour cela que nous vous demandons de nous dire quelles sont ces méthodes, quelles sont ces modalités d’arbitrage, aussi bien sur le plan quantitatif que qualitatif, je pense en particulier aux investissements. Parce que oui, nous vous avons fait des propositions, auxquelles vous n’avez pas répondu par exemple. Nous vous avons demandé, concernant les éléments qualitatifs des investissements : Est-ce que toutes les décisions passent bien au filtre d’un impact positif ou neutre pour le climat et la biodiversité ? Est-ce que toutes les décisions se concentrent sur la transformation et l’adaptation de nos territoires ? On ne vous dit pas ce que vous devez faire. Nous vous demandons juste de nous dire comment vous faites. Et nous vous faisons des propositions pour que vos arbitrages soient compris et acceptés de tous, même si nous ne partageons pas vos analyses politiques.

Ensuite un autre point, et j’en terminerai là-dessus. Nous sommes, fondamentalement, pas d’accord avec vous, Monsieur BRIAND. Non, la baisse de l’épargne n’est pas conjoncturelle. Déjà, nous avons convenu ensemble que les deux prochaines années risquaient de ressembler, ou en plus grave, à l’année 2020. Mais très sincèrement, faire le pari que l’épargne va remonter dans la durée du mandat qui est devant nous, nous pensons que c’est nier la réalité.