La tarification saisonnière de l’eau dans la métropole de Toulouse a été annoncée de manière prématurée dans la presse, sans concertation, alors qu’elle va directement impacter l’économie de nombreux foyers.

Notre communiqué de presse

Le projet de tarification saisonnière de l’eau est l’un des principaux sujets du Conseil de Métropole de ce jeudi 4 avril. Cette mise en œuvre intervient de manière précipitée, dès le 1er juin prochain, sans concertation ni analyse préalable approfondie, et poursuit l’objectif de renflouer les caisses du délégataire en 2024. Comme l’a exposé Sophie BOUBIDI, « les usagers vont payer +42% de juin à octobre, et bénéficier des -30% seulement sur les deux derniers mois. De ce fait, pour 2024, la facture de chaque consommateur va grimper de 13% ».

 Nous demandons une analyse approfondie des impacts de cette évolution tarifaire sur les usagers, les délégataires, une application repoussée au 1er janvier 2025 et concomitamment. Nous demandons la mise en œuvre d’une tarification progressive avec gratuité des premiers m3. Seule cette mesure permettra de garantir l’accès à l’eau pour toutes et tous pour les besoins fondamentaux et de répartir plus équitablement l’effort en pénalisant les surconsommations. C’est le sens des amendements et du vœu que nous défendrons au Conseil de Métropole du jeudi 4 avril.

Le vœu que l’on présentera en Conseil

Les impacts du changement climatique se renforcent à un rythme alarmant et ceux-ci sont désormais tangibles dans nos territoires et perceptibles par tout un chacun. Un record absolu de chaleur a été enregistré à la station météo de Blagnac le 23 août 2023, avec une température enregistrée de 42,4°C. Les records de chaleur sont régulièrement dépassés, les vagues de canicule se font plus fréquentes, plus longues et plus intenses et elles ont tué plus de 600 personnes en Occitanie lors de l’été 2022. Ces températures extrêmes s’accompagnent de sécheresses qui impactent très fortement l’agriculture et l’ensemble des écosystèmes, notamment les cours d’eau. Ainsi, la Garonne peine à maintenir son niveau d’étiage au cours de la période estivale, en dépit de lâchers d’eau records depuis les barrages des Pyrénées. Le débit diminue, la température de l’eau augmente et la qualité se dégrade, rendant plus complexes les opérations de potabilisation. A terme, l’approvisionnement en eau potable de notre Métropole pourrait être menacé, considérant la diminution de -40% de débit de la Garonne anticipée pour 2050. Il est dès lors impérieux pour notre collectivité d’anticiper ce bouleversement et de s’adapter dès aujourd’hui. 

 Dans ce contexte de raréfaction, l’eau devient une ressource d’autant plus précieuse qu’elle est incontournable pour permettre à la population de faire face aux canicules, épisodes qui mettent en danger la santé et la vie des personnes les plus vulnérables : personnes malades, âgées, résidents de passoires énergétiques, enfants, travailleurs du BTP… Boire, se laver et se rafraîchir sont des besoins vitaux qui doivent être garantis à chacune et chacun, en toutes circonstances et sans aucune restriction économique. En ce sens, la question de la tarification de l’eau doit être traitée avec beaucoup d’attention, avec toujours le souci premier de la justice sociale et de l’équitable partage de la ressource. Aussi, la mise en œuvre d’une tarification progressive, qui octroie la gratuité des premiers m³ d’eau considérés comme vitaux et qui applique un prix plus élevé sur les tranches de consommation considérées comme superflues, permet d’inciter à la sobriété tout en protégeant le droit fondamental de chaque consommateur d’avoir accès à l’eau dans des conditions économiquement acceptables. C’est le choix opéré par la Métropole du Grand Lyon qui appliquera la tarification progressive dès le 1er janvier 2025.  

Dans la métropole toulousaine, le choix a été fait de mettre en place une tarification saisonnière à compter du 1er juin prochain. Il s’agit d’une évolution importante qui pourrait avoir un impact fort sur les usagers de l’eau mais sa mise en œuvre dès le mois de juin est précipitée. Cette mesure n’a fait l’objet de discussions ni avec les communes et leurs élus, ni avec les habitants et les usagers de l’eau. L’impact économique sur la Métropole et sur les habitantes et habitants, via les mécanismes de compensation bénéficiant au délégataire n’est pas maitrisé. Pourtant, la gestion de l’eau est un enjeu crucial pour notre avenir et mérite de faire l’objet d’un vrai débat démocratique. En effet, le sujet ne saurait être résumé au constat que la ressource se raréfie l’été, ce qui justifierait une régulation de la demande par les prix. Les usages de l’eau doivent être distingués et priorisés, certains usages doivent être sanctuarisés tandis que d’autres doivent être pénalisés et ce, en toutes saisons. Par ailleurs, la préservation de la ressource en eau ne saurait se résumer à une politique tarifaire : d’autres leviers doivent être mobilisés pour inciter aux changements durables de comportements. 

Une politique efficace d’incitation à la sobriété dans les usages de l’eau, notamment s’agissant des usages superflus tels que l’arrosage de pelouses, le remplissage de piscines individuelles ou encore le nettoyage de véhicules, doit logiquement conduire à une baisse concrète des volumes d’eau consommés annuellement. Dès lors que la préservation de la ressource est l’objectif recherché, il s’agit de l’assumer et de le porter politiquement. Le contexte d’aggravation des impacts du changement climatique et de menaces sur notre ressource en eau justifie largement cet objectif. Aussi, il est normal que le service public de l’eau et de l’assainissement s’adapte en conséquence et que les délégataires contribuent à cet effort partagé de sobriété, y compris sur le plan financier.  

Par conséquent : 

Article 1

Le Conseil de Toulouse Métropole s’engage à reporter l’application de la tarification saisonnière au 1er janvier 2025. Ce délai sera mis à profit pour communiquer une analyse détaillée des consommations mensuelles par typologie d’usager, pour mener une concertation de qualité avec l’ensemble des élus locaux, les habitants et tous les usagers de l’eau, afin d’apporter aux parties prenantes tous les éléments d’information utiles et d’aboutir à une vision partagée de la gestion de la ressource. 

Article 2

Le Conseil de Toulouse Métropole s’engage à étudier la faisabilité technique (ex : compteurs ou sous-compteurs individuels) et financière de la mise en place de la tarification progressive, en octroyant la gratuité pour les premiers m3 d’eau dits « vitaux » et en pénalisant fortement les consommations superflues.  

Article 3

Le Conseil de Toulouse Métropole s’oppose à toute compensation financière en cas de baisse de la consommation d’eau qui impacterait négativement les résultats financiers des délégataires du service public de l’eau et de l’assainissement, y compris dans le cas où celle-ci serait imputable aux politiques tarifaires visant la sobriété.